Jean-Jacques Rousseau
Il est vrai que Télégraphe a longtemps conservé un caractère rural, comme le montre le premier témoignage littéraire sur les hauteurs de Belleville, sans doute un peu au sud du domaine de Saint Fargeau. Il s’agit des célèbres lignes écrites par Jean-Jacques Rousseau au soir de sa vie, dans la deuxième de ses Rêveries du promeneur solitaire :
« Le jeudi 24 octobre 1776, je suivis après dîner les boulevards jusqu’à la rue du Chemin Vert, par laquelle je gagnai les hauteurs de Ménilmontant, et de là prenant les sentiers à travers les vignes et les prairies, je traversai jusqu’à Charonne le riant paysage qui sépare les deux villages, puis je fis un détour pour revenir par les mêmes prairies en prenant un autre chemin. Je m’amusais à les parcourir avec ce plaisir et cet intérêt que m’ont toujours donnés les sites agréables, et m’arrêtant quelquefois à fixer des plantes dans la verdure. J’en aperçus deux que je voyais assez rarement autour de Paris et que je trouvai très abondantes dans ce canton-là. L’une est le Picris hieracioides, de la famille des composées, et l’autre le Bupleuron falcatum, de celle des ombellifères. Cette découverte me réjouit et m’amusa très longtemps et finit par celle d’une plante encore plus rare, surtout dans un pays élevé, savoir le Cerastium aquaticum que, malgré l’accident qui m’arriva le même jour, j’ai retrouvé dans un livre que j’avais sur moi et placé dans mon herbier.
Enfin, après avoir parcouru en détail plusieurs autres plantes que je voyais encore en fleurs, et dont l’aspect et l’énumération qui m’était familière me donnaient néanmoins toujours du plaisir, je quittai peu à peu ces menues observations pour me livrer à l’impression non moins agréable mais plus touchante que faisait sur moi l’ensemble de tout cela. Depuis quelques jours on avait achevé la vendange ; les promeneurs de la ville s’étaient déjà retirés ; les paysans aussi quittaient les champs jusqu’aux travaux d’hiver. ».
C’est alors que Jean-Jacques Rousseau est renversé par un gros chien danois, perd connaissance et échappe de peu aux roues d’un carrosse qui passent tout près de sa tête sur le sol.
Cette promenade qui aurait pu s’achever en tragédie n’a pas laissé de trace dans le quartier et le premier écrivain dont on trouve encore l’empreinte naît en 1793, quinze ans après la mort de Rousseau. Il s’agit de Paul de Kock, dont une des rues les plus charmantes du quartier porte le nom.